2. Ancien siège de l’administration civile nazie au Luxembourg (1940-1944)
2. Ancien siège de l’administration civile nazie au Luxembourg (1940-1944)
Après l'invasion allemande, le Grand-Duché a d'abord été placé sous administration militaire. Puis, le 21 juillet 1940, Gustav Simon, Gauleiter du parti nazi dans le Gau Koblenz-Trier, fut nommé chef de l’administration civile (CdZ) au Luxembourg. Sa mission était de rattacher le pays au Reich, d’y éliminer toutes les influences étrangères et de « refaire » des Luxembourgeois des Allemands ce que, d’après l’idéologie nazie, ils étaient par l’histoire, la culture et le « sang ». Antisémite et nazi convaincu, Simon avait l’intention de rendre le Luxembourg judenrein le plus rapidement possible – c’est-à-dire d’éliminer sa population juive dans les plus brefs délais.
Jusqu'à la libération du Luxembourg par les Alliés le 10 septembre 1944, le siège de l'administration civile était situé dans l'aile nord du bâtiment de l'administration centrale de l'entreprise sidérurgique ARBED. Le 6 septembre 1940, il introduisait au Luxembourg l’essentiel de la législation antisémite nazie ainsi que les mesures économiques qui allaient lui permettre de s’emparer des biens de la population juive. Conformément aux lois de Nuremberg déjà en vigueur en Allemagne depuis 1935, les mariages entre personnes de « sang juif » et celles « de sang allemand ou apparenté » furent strictement interdits. De nombreuses autres mesures antisémites allaient suivre.
Les Juifs furent ainsi exclus de la fonction publique et de toutes les professions libérales. Les entreprises durent licencier sans préavis leurs employés juifs. Le 4 septembre 1941, 97 Juifs furent astreints au travail forcé en Allemagne (carrière de Nennig, entreprise Paul Wurth, construction de l’autoroute de l'Eifel). Les biens des Juifs furent gelés, les commerces et les entreprises appartenant à des Juifs confisqués, puis liquidés ou vendus à bas-prix à des non-Juifs (l’« aryanisation »). Environ 250 des 423 « entreprises juives » confisquées se trouvaient à Luxembourg-Ville, un grand nombre dans les actuelles Grand-Rue et rue Philippe II.
À dater du 1er novembre 1940, il fut interdit aux enfants juifs de fréquenter les écoles publiques. À partir du 1er août 1941, il fut interdit aux juifs de quitter leur domicile entre 19 heures et 7 heures. Il leur fut par ailleurs interdit de fréquenter les restaurants, les cinémas, les théâtres, les terrains de sport et les piscines ainsi que de prendre part à des manifestations publiques. Ils durent enfin s’identifier en public en portant un brassard jaune au bras gauche. En octobre 1941, il leur fut interdit de fréquenter les salons de coiffure tenus par des non-Juifs et de prendre le tramway. Ils avaient de surcroît l’obligation de ne faire leurs courses qu’entre 14h00 et 16h00.
À l’automne 1941, une autre ordonnance interdit aux Juifs de quitter leur commune de résidence sans autorisation écrite de la police. À dater du 17 octobre 1941, les Juifs âgés de plus de six ans durent porter en public une étoile jaune (l’« étoile juive), cousue sur leurs vêtements. En plus de ces ordonnances, le Consistoire israélite – rebaptisé Ältestenrat der Juden (« Conseil juif des Anciens ») à partir du 15 avril 1942 – se vit notifier arbitrairement de nouvelles mesures coercitives. Au printemps 1941, la démolition des synagogues de Luxembourg et d’Esch-sur-Alzette fut ordonnée. En novembre 1941, le Consistoire annonça, sur ordre de la Gestapo, qu’il était désormais interdit aux Juifs d’entretenir des relations amicales avec des non-Juifs ou de s’entretenir avec elles dans la rue. La peine prévue pour tous ceux qui contrevenaient à cette règle – Juifs comme non-Juifs – était l’internement dans un camp de concentration. Les Juifs durent en outre adopter des prénoms supplémentaires, censés les stigmatiser davantage encore, Sara pour les femmes, Israel pour les hommes.
Au cours de l’hiver 1941/42, les Juifs furent contraints de remettre les objets suivants aux autorités : appareils photo, films, jumelles, machines à écrire, bicyclettes, gramophones, tous leurs appareils électriques, leurs couverts en argent, leurs objets de valeur, leurs vêtements chauds - fourrures, écharpes et sous-vêtements en laine, gants, cache-oreilles – ainsi que leurs vieux articles textiles et leurs vieux vêtements. Cette mesure eut pour conséquence de priver de nombreuses personnes de vêtements chauds pour se protéger du froid. Au printemps 1942, il fut interdit aux Juifs d’utiliser les cabines téléphoniques publiques, recevoir des journaux ou posséder des animaux domestiques. Les logements qu’ils habitaient devaient être signalés de manière visible par une étoile juive.