4. Villa Pauly - ancien siège de la Gestapo (1940-1944)
4. Villa Pauly - ancien siège de la Gestapo (1940-1944)
La Villa Pauly a été construite en 1923 pour le chirurgien luxembourgeois Norbert Pauly, auquel elle servait à l’origine de maison d’habitation et de cabinet médical. Au moment de l’invasion allemande, le Dr Pauly était en vacances dans le sud de la France. À son retour, à la fin de l'été, il apprit que sa maison avait été réquisitionnée par la Gestapo, la police secrète de l’Etat nazi, avec laquelle il dut, contraint et forcé, signer un contrat de location. Outre la Villa Pauly, qui était son quartier général dans le Luxembourg occupé, la Gestapo disposait d’antennes à Esch-sur-Alzette et à Diekirch.
La Villa Pauly devint l’incarnation de la terreur nazie au Luxembourg. De nombreux résistants et opposants au régime nazi y furent détenus et interrogés - souvent violemment. Les caves voûtées de la villa servaient de chambre de torture. Des survivants ont raconté y avoir été suspendus à des tuyaux de chauffage, la tête en bas, et parfois frappés avec un nerf de bœuf. Quelques cellules avaient également été aménagées au sous-sol, elles n’ont toutefois pas été conservées après la guerre. Après un premier interrogatoire brutal, beaucoup de prisonniers avaient du mal à remonter l’escalier menant aux étages supérieurs, ce qui leur valait de nouveau des coups de pied et d’autres sévices. Environ 1500 personnes soupçonnées de résistance au nazisme ont été déportées par la Gestapo vers le camp de concentration de Hinzert, près de Trèves.
C’est également depuis la Villa Pauly que furent organisés le recensement et la déportation des Juifs du Luxembourg. Le 12 septembre 1940, le Grand-Rabbin Robert Serebrenik fut informé que tous les Juifs devaient quitter le pays avant le 26 septembre. Cet ordre sema un vent de panique dans la communauté juive. Le Consistoire israélite demanda alors un délai, offrant sa collaboration en contrepartie. L’interlocuteur du Consistoire israélite au sein de la Gestapo était un officier du nom d’Otto Schmalz, qui était par ailleurs aussi chargé de la déportation des Juifs.
Les membres du Consistoire devaient se rendre régulièrement à la Villa Pauly pour y recevoir les ordres concernant l’organisation des déportations. Suite au départ du premier convoi de déportation, dans la nuit du 16 au 17 octobre 1941, le Gauleiter Gustav Simon fit annoncer par la presse que le Luxembourg était dorénavant judenrein, même si en réalité six autres trains de déportation partirent par la suite.
La solidarité des Luxembourgeois non-juifs avec la population juive fut faible, voire inexistante. À l’heure actuelle, seuls une vingtaine de cas où des Juifs ont été cachés temporairement par des non-Juifs sont connus. Cela s’explique d’une part par l’antisémitisme, surtout religieux, qui régnait alors au Luxembourg, ainsi que par le fait que beaucoup de Juifs étaient des réfugiés originaires d’Allemagne ou d’Autriche, qui n’avaient eu que peu de contact avec la population locale.
C’est également à la Villa Pauly que des mesures coercitives contre d’autres minorités, comme les Témoins de Jéhovah, les homosexuels, les Sinté et les Roms ainsi que les soi-disant « asociaux » furent prises.
Après la guerre, 16 agents de la Gestapo qui avaient été en service au Grand-Duché pendant l’occupation furent poursuivis pour crimes de guerre par la justice luxembourgeoise et condamnés. La Villa Pauly fut louée par l’État luxembourgeois et accueillit différents ministères (Santé, Travail, Affaires sociales). En mars 1960, l’État racheta finalement le bâtiment, qui fut classé monument historique en 1989. Aujourd’hui, la Villa Pauly abrite le siège du Comité pour la mémoire de la Deuxième Guerre mondiale. Créé en 2016, il s’agit d’un organe consultatif paritaire où, pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les victimes de la Shoah sont représentées sur un pied d’égalité avec celles de la résistance et des enrôlés de force. La Villa Pauly abrite également le siège de la Fondation nationale de la Résistance (FONARES) et de la Fondation luxembourgeoise pour la Mémoire de la Shoah.